Cardinal Georges Cottier

La nostalgie des sources

Ce livre voudrait apporter une contribution à une réflexion sur le statut épistémologique de la connaissance religieuse. Son champ se situe à la croisée de plusieurs disciplines : philosophie de la religion, sciences des religions, histoire des religions, psychologie de la religion, sociologie de la religion, anthropologie religieuse, etc. 

Le statut épistémologique lui-même de ces « disciplines » pose déjà une série de problèmes. Par exemple, le rôle de l’interprétation dans ce qu’il est convenu d’appeler les « sciences humaines » n’implique-t-il pas un lien de dépendance intrinsèque de ces disciplines à l’égard de la philosophie ? Quoi qu’il en soit, ces disciplines, en tant que sciences au sens moderne du terme, obéissent à des exigences de rigueur critique que commandent la nécessaire délimitation de leur objet et une prudence méthodologique quant à la nature de leurs affirmations : elles sont ainsi amenées à s’arrêter avant tout jugement de portée ultime et globale. C’est pourquoi, par exemple, là où Freud prononce sur la religion des verdicts sans appel, il quitte le terrain strictement scientifique pour se laisser tenter par des extrapolations qui ressortissent à ses présupposés philosophiques. 

À l’inverse, la philosophie, en tant que telle, s’efforce de poser des jugements qui portent sur l’essence de la chose et sur ses principes et causes essentiels. Cependant, il est clair que la philosophie de la religion a besoin de l’apport de tout le matériel, extrêmement riche, que ces disciplines ont recueilli, décrit et classé. Le philosophe ne vise-t-il pas à la connaissance du réel dans sa profondeur ? Il doit donc être attentif à tout ce que la patiente recherche des scientifiques permet de dégager et de mettre en évidence.